Rozay cyclo
club cyclotouriste de Rozay en Brie (77)
Comment devient-on un Super
Randonneur ?
(l'expérience du Gillou)
Explications
Les premiers brevets
Le brevet de 600 km
Conclusions
Simple et compliqué à la
fois:
Simple, pour la théorie, il
suffit de faire 4 BRM (Brevets de Randonneurs Mondiaux) la même année. Ce sont
des randonnées à allure libre sur un parcours fixé par l'organisateur avec des
points de contrôle et un temps maximum à effectuer. Ils sont ensuite homologués
par l'ACP (Audax Club Parisien) qui organise tous les 4 ans le Paris Brest Paris
randonneur.
Plus compliqué dans la
pratique : on est en autonomie totale : pas de fléchage, ni de ravitaillement
organisé, pas de voiture suiveuse et le programme est dense.
Un 200 km en moins de 13 h 30
Un 300 km en moins de 20 h 00
Un 400 km en moins de 27
heures
Un 600 km en moins de 40
heures
Cette année, c'est l'année de
"Paris Brest Paris Randonneur". Il fallait obligatoirement faire ces
quatre brevets pour pouvoir s'inscrire au PBP. Il y a beaucoup d'organisations
et beaucoup de participants.
Après avoir effectué Bordeaux
Paris l'an dernier, mes amis Jean-Jacques et Kevin ont eu envie d'aller plus
loin et de s'inscrire au PBP. Je leur avais promis de les accompagner le plus
loin possible.
Le 21 mars, on a effectué le
200 km de Noisiel. Sans appréhension car c'est une distance que j'ai déjà
réalisée une vingtaine de fois en 12 ans. Beaucoup de monde, avec des
cyclosportifs pressés de finir. Je me suis rapidement trouvé isolé et fait le
plus gros du parcours vers la Champagne seul en 9 h 15 avec un compteur
affichant 23,5 km/h. J'étais quand même content de ma condition physique.
Le 11 avril, le 300 km de
Noisiel, mais en direction de la Picardie, cette fois ci c'est une distance que
j'ai réalisée seulement trois fois. Il y a moins de participants au départ et
l'allure est plus calme. On va rouler à 5 cyclos du club avec Hubert et Marc
sur la moitié du parcours. Je vais avoir un passage à vide dans le vent et dans
les côtes à mi-parcours. Heureusement ça ne durera que deux heures. Kevin, lui
aura une baisse de tension au dernier point de contrôle au km 225 à
Villers-Cotterêts. Mais on finira par se refaire la santé et on terminera en 13
h 25 avec 22,2 km/h de moyenne en fédérant un petit groupe de coureurs isolés
dont Thierry une connaissance de Kevin.
Les 03 et 04 mai encore en
partant de Noisiel mais avec un départ à 16 h00 pour le 400 km. Il va falloir
rouler toute la nuit vers la Bourgogne. Il y a encore moins de participants et il
ne reste pratiquement que des spécialistes des longues distances. Les vélos de
compétition avec des roues à jantes hautes ont fait place aux vélos équipés de
sacoches et d'éclairages puissants. Au bout d'une heure, il va nous falloir
faire un choix stratégique. Rouler à allure rapide dans un gros peloton qui
protège du vent ou rouler seuls à une moindre allure mais dans le vent. On
retiendra la première option jusqu'à Joigny. Puis on roulera à notre rythme
dans la nuit. La nuit tout est différent. Dans les montés, on ne sait pas si ça
va être court ou long, on ne peut pas prévoir si la pente va s'accentuer. Dans
les descentes, on ne voit pas le virage suivant. La navigation est plus
difficile pour lire les cartes et voir les panneaux routiers. On ne voit plus
les compteurs. Il fait plus froid que le jour et on aura 8°C après les 20°C du
départ. Thierry nous fera une belle cabriole pour avoir roulé dans l'herbe.
Kevin nous fera encore un malaise au contrôle de Gien. Il lui faudra une heure
de récupération avant de repartir. Sur ce contrôle, au milieu de la nuit, on
voit des gars qui se restaurent, d'autres qui dorment sur la table. On
repartira vers 3 h 00 du matin. Pour moi tout va bien jusqu'au petit jour où je
dois lutter contre la somnolence pendant une heure. Heureusement le dernier
contrôle à Moret sur Loing arrive et va me requinquer. Cerise sur le gâteau,
les copains du club viennent à notre rencontre et nous accompagnent une bonne
partie du retour vers Noisiel. Pendant ce temps-là Thierry, nous fera aussi une
petite perte de connaissance avant de finir gaillardement notre premier 400 km
en 20 h 15' à 24,0 km/h au compteur.
Je vais prendre le départ
avec Thierry car Jean-Jacques et Kevin ont décidé de faire le 600 km de Reims
la semaine suivante.
3 h 00 du matin, samedi
30 mai, lever. Arrivé à Noisiel, je
retrouve Thierry qui a fini le 300 km avec mes copains et moi et a fait
entièrement le 400 km. Après avoir récupéré ma carte de pointage, on va
attendre dans le sas de départ. On se salue entre routiers : tout le monde a un
peu roulé avec tout le monde sur les brevets précédents. Beaucoup d'angoisse,
je vais uriner trois fois en l'espace d'une demi-heure.
5 h 05 ça y est, c'est parti
; les 180 participants s'élancent par vagues de 30 toutes les 5 minutes.
1er tronçon 90 km Noisiel/Mont
Saint Père (02) à côté de Château Thierry, c'est un peu accidenté. Des groupes
se rejoignent, gonflent puis se dégonflent soit parce que l'allure est trop
rapide pour eux soit pas assez. Beaucoup cherchent à se protéger du vent. Tout
le monde cherche la bonne allure. Arrivée au contrôle vers 8 h 45.
2ème tronçon Mont
Saint Père/Bouzy (51) 61 km au-dessus d'Epernay. On roule dans les vignes de
Champagne à perte de vue. Arrivée vers midi
3ème tronçon Bouzy/Troyes
(10) 111 km. Thierry voulant attendre le groupe avec lequel on roulait depuis
le début, se laisse décrocher. Je me retrouve seul dans des grandes lignes
droites avec un vent défavorable pensant me faire rattraper. Il n'en sera rien.
Je serai un moment accompagné par un cyclo de l'US Métro mais on roulera de
front pour discuter. Finalement je vais arriver avec une bonne demi-heure
d'avance guidé tout à la fin par des cyclos de Val d'Europe. Arrivée vers 17 h
30
4ème tronçon
Troyes/Montbard (21) 97 km. Je repars
avec le groupe de Val d'Europe. Le rythme est bon : sur le plat je prends
beaucoup de relais, mais dans les côtes, je gère pour ne pas me laisser
distancer. On remet les lumières et les gilets jaunes vers 9 h 30. Arrivée de
nuit vers 23 h 15. Je vais dormir sur un petit matelas fin sous ma couverture
de survie. Je ne dors pas très bien parce que ça rentre et ça sort sans arrêt.
On se congratule beaucoup
plus que sur les brevets précédents. Je fais valider ma carte et achète la
médaille souvenir comme beaucoup. Officiellement je suis qualifiable pour faire
Paris Brest Paris. Je n'ai pas trop mal aux jambes ni aux fesses. Je ressentais
la fatigue seulement dans les dernières côtes.
Contrairement à certains
cyclos qui mangent un plat garni dans des restaurants, des gros sandwichs, des
Tupperware de plats de pâtes ou de riz aux contrôles, j'ai choisi de ne pas
faire de vrai repas mais de manger toutes les heures un petit encas que je
transporte (petit cake, pain d'épice, barre de céréales, petit sandwich, gâteaux
apéritifs salés, barre de pâte d'amande, petit sachet de fruits oléagineux et
raisins secs). C'est une formule qui me convient bien. Elle m'évite
l'hypoglycémie et elle m'évite de charger l'estomac. En plus, il faut ajouter 5
bidons de 750 ml de boisson énergétique isotonique et quelques dosettes de gel.
J'ai quand même dépensé 12766 calories (mesurées au cardiofréquencemètre). J'ai
eu moins sommeil que sur le 400 km, où nous avions roulé toute la nuit (avec
une pause mais en restant éveillé).
Dimanche soir, dormant devant
la télé, je suis allé me coucher à 20 h 45. Le lendemain, je me suis réveillé
sans douleur pour aller travailler, hormis une entre les épaules et la nuque,
contractée lors du 400 km. Par contre, j'ai eu un bon coup de barre pendant la
pause méridienne après avoir mangé et corrigé mes cahiers.
C'est une belle
aventure qui n'est pas réservée à des surhommes, mais à des sportifs entraînés,
organisés et motivés.
Il faut savoir
gérer son allure en fonction de sa condition physique, du profil, de la
présence de groupes et des délais à respecter.
Il faut savoir
gérer son alimentation solide et liquide.
Il faut savoir
gérer sa navigation si on est isolé.
Il faut savoir
gérer sa tenue vestimentaire avec parfois des grandes amplitudes de
températures.
Il faut prévoir tout
ce qui peut arriver, car on est seul pour se ravitailler et réparer.
Si possible, c'est
beaucoup plus rassurant quand on est accompagné comme je l'ai été, car dans les
moments difficiles, on peut être tenté de tout plaquer.
Alors tentez
l'aventure !
Gilles M. juillet 2015